«Quand la sonnerie a encore retenti, que la porte du box s'est ouverte, c'est le silence de la salle qui est monté vers moi, le silence, et cette singulière sensation que j'ai eue lorsque j'ai constaté que le jeune journaliste avait détourné les yeux. Je n'ai pas regardé du côté de Marie. Je n'en ai pas eu le temps parce que le président m'a dit dans une forme bizarre que j'aurais la tête tranchée sur une place publique au nom du peuple français...»
Il y a des livres dont le succès ne surprend personne. Les Liaisons dangereuses, en 1782, n'est pas de ceux-là. L'auteur, un officier d'artillerie, n'a guère de réputation dans le monde des Lettres. Son libraire prévoit un tirage convenable, mais prudent : 2000 exemplaires. Le roman sort en mars. On se l'arrache. On le dénonce, on l'admire, on le dénonce en l'admirant. C'est «le mécanisme même de la scélératesse développée dans tous ses ressorts». Chacun fait des «applications» : de quel libertin réel ce «délicieux infâme» de Valmont est-il le portrait ? L'auteur n'est pas épargné : «Parce qu'il a peint des monstres, on veut qu'il en soit un.» Le libraire, lui, ordonne une réimpression. Cela ne fait que commencer. Il est difficile de cerner les raisons d'un succès. À écouter les premiers lecteurs, celui des Liaisons tiendrait en partie à l'ambiguïté du livre. L'auteur est-il lui-même un Valmont de garnison, ou a-t-il au contraire fait oeuvre morale en dénonçant les mauvaises moeurs ? Vaine question : Laclos a très habilement décentré la question morale. Et puis, quand on aurait expliqué les motifs du succès, que dire de sa durée ? Les livres à la mode se démodent ; pas les Liaisons. Très vite, les héros se mettent à vivre dans l'imaginaire du public. Bientôt, ils montent sur le théâtre. Marie-Antoinette chante Les Adieux de la présidente de Tourvel, romance. Les imitations, suites ou «suppléments» fleurissent. Les rumeurs circulent. On aurait interdit la vente de l'ouvrage. Mais la première condamnation attestée date de 1823 : la Restauration n'a pas apprécié cette peinture de la société d'Ancien Régime. Plus tard, la critique marxiste verra dans le roman le pamphlet politique d'un homme déçu par l'aristocratie. Des écrivains, Baudelaire, Gide, Suarès, Giraudoux, Malraux, apportent leur pierre à l'édifice. Et des illustrateurs : à chacun sa lecture, du néoclassicisme aux éclairages les plus crus. On continue à s'emparer des héros de Laclos pour leur faire vivre d'autres aventures. Chez Pascal Quignard, Merteuil exilée rencontre Jane Austen. Certaines incarnations font date. Jeanne Moreau est aussi inoubliable au cinéma en 1959 (Les Liaisons dangereuses 1960 de Roger Vadim, dialogues de Roger Vailland) qu'au théâtre en 2007 (Quartett de Heiner Müller, 1982). Il y aura d'autres pièces, d'autres films, d'autres actrices (Glenn Close) regardées par d'autres écrivains (Philippe Sollers), deux cents ans après une Révolution dont l'oeuvre de Laclos aurait été l'une des «causes secrètes». On peut désormais tout savoir des Liaisons sans avoir lu le roman. Mais on peut aussi le lire : après tout, c'est l'un des plus grands livres qui soient. Il est publié ici d'après une édition rare, datée de 1787 et sans doute préparée par Laclos lui-même. Suit un éventail de réactions, de critiques, d'adaptations, de continuations et d'images qui
La Métamorphose révèle une vérité méconnue, les conventions disparaissent., les masques tombent.
Ce récit est un des plus pathétiques et des plus violents que Kafka ait écrits; les effets en sont soulignés à l'encre rouge, les péripéties ébranlent les nerfs du lecteur. C'est l'histoire, "excessivement répugnante ", dit l'auteur, d'un homme qui se réveille changé en cancrelat. Cette transformation est un châtiment imaginaire que Kafka s'inflige. Et son personnage est celui qui ne peut plus aimer, ni être aimé: le conflit qui se déroule dans une famille bourgeoise prend une ampleur mythique.
Seuls quelques éléments comiques ou grotesques permettent de libérer de l'oppression du cauchemar.
Le Figaro du 23 janvier 1868 à propos de Thérèse Raquin : «C'est le résidu de toutes les horreurs. Le sujet est simple, le remords physique de deux amants qui tuent le mari mais qui, ce mari tué, n'osent plus s'étreindre, car voici le supplice délicat qui les attend : Ils poussèrent un cri et se pressèrent davantage, afin de ne pas laisser entre leur chair de place pour le noyé. Et ils sentaient toujours des lambeaux de Camille, qui s'écrasait ignoblement entre eux. Enfin, un jour, ces deux forçats de la morgue tombent épuisés, empoisonnés, l'un sur l'autre, devant le fauteuil de la vieille mère paralytique, qui jouit intérieurement de ce châtiment par lequel son fils est vengé... Forçons les romanciers à prouver leur talent autrement que par des emprunts aux tribunaux et à la voirie.» De sa voix chaude, Caroline Breton nous emporte dans le drame passionnel de Thérèse Raquin, héroïne exceptionnelle. Un classique terrifiant et fascinant dans le Paris du XIX? ;e siècle. L'écoute en classe de ce CD est autorisée par l'éditeur.
Du Roman de Renart, ensemble de récits (les «branches») composés aux XII? et XIII? siècles, la Pléiade propose, principalement d'après un manuscrit inédit, une édition intégrale et bilingue (ancien français / français moderne). À l'origine de ces récits, une faute inexpiable, le viol par Renart de l'épouse d'Isengrin. Au centre, le goupil, universel trompeur. Autour de lui, des animaux qui jouent aux hommes:sans rien perdre de leur animalité, le loup Isengrin, le chat Tibert, le cerf Brichemer, barons du roi Noble, usurpent les dignités et le langage humains. Leurs valeurs? l'intérêt, le désir, la volonté de puissance:les moeurs du temps et les travers des hommes trouvent dans le travestissement animal un miroir sans pitié. Ce qui les pousse à agir? la faim. C'est parce qu'il faut manger que Renart se lance dans des aventures violentes, dont la puissance comique ne fait pas oublier l'extrême cruauté. Cruauté des situations, des gestes, des sentiments, cruauté des gabs, ces paroles lancées aux vaincus. Car le Roman de Renart est aussi le roman de la parole. Instrument de la ruse, arme des faibles (sans elle, un renard ne saurait vaincre un loup), la parole, ici, ne se soucie pas de vérité. Elle méconnaît les repères habituels du bien et du mal. Elle permet à qui la maîtrise - et nul ne la maîtrise mieux que Renart - de nier l'évidence, de triompher de la force et d'échapper toujours au châtiment. Les malheureux qui reçoivent les nombreuses «confessions» du goupil en savent quelque chose:écouter Renart, c'est, déjà, être sa victime.
Le jeune Perceval est élevé par sa mère à l'abri du monde. Le jour où il rencontre dans la forêt des chevaliers aux armures étincelantes, sa décision est prise:il sera lui aussi chevalier! Il se rend aussitôt au château du roi Arthur. Mais pour atteindre son idéal, Perceval va devoir affronter mille dangers et percer le mystère du Graal, ce vase sacré aux pouvoirs miraculeux.
Pourquoi Sheherazade raconte-t-elle autant d'histoires ? C'est parce que, tant qu'elle tient son auditoire en haleine, on ne la tuera pas. Et c'est un monde étonnant et agité qui voit le jour grâce à ce contrat. Quand Ali Baba découvre un trésor caché, dans une caverne, en prononçant la formule « Sésame, ouvre-toi ! », quarante voleurs, jaloux et habiles, décident de l'assassiner... Au fil de ces récits merveilleux, vous vous promènerez dans des villes exotiques, des jardins parfumés, des palais royaux et des rues marchandes... À moins que vous ne soyez enfermés dans un cachot ! Même là, le dépaysement est assuré. L'accompagnement pédagogique remonte le temps jusqu'au VIII? siècle, pour retrouver, à Bagdad, les origines du texte mythique que sont Les mille et une nuits. Le commentaire, rythmé par des études lexicales et des groupements de textes, décrypte de façon claire les ressorts de l'intrigue et interroge les spécificités du conte : objets magiques, caractères des personnages, lieux sont analysés. On comprend mieux, dès lors, la postérité des Mille et une nuits. Contes (VIII? siècle) recommandés pour la classe de sixième. Textes choisis.
Pourquoi Crastaing, notre prof de français, nous fait-il si peur ? Pourquoi terrorise-t-il Pope, mon père lui-même ? Qu'est-ce que c'est que cette épidémie après son dernier sujet de rédaction ? Un sujet de rédaction peut-il être mortel ? Un sujet de rédaction peut-il massacrer une classe tout entière ? Qui nous sauvera de cette crastaingite aiguë ? Kamo ? Kamo ! Si Kamo n'y arrive pas, nous sommes perdus !
Daniel Pennac n'est pas un acteur, c'est un conteur. Il sait tour à tour vous faire rire et vous émouvoir. Sa voix chaleureuse épouse avec tendresse son texte, qu'il sert comme personne.
L'écoute en classe de ce CD est autorisée par l'éditeur.
Lecture accompagnée par Michel Besnier
Voici l'histoire de Wang-Fô, le peintre chinois. Il parcourait le royaume des Han en compagnie de Ling, son fidèle disciple, à la recherche de nouveaux paysages. Ses tableaux étaient si beaux qu'on les disaient magiques. Mais un jour, l'empereur convoqua le vieux maître pour le menacer d'un terrible châtiment...
Leur père refuse de les marier avec celui qu'elles aiment ? Lucile et Lucinde font toutes deux semblant d'être atteintes par un mal inconnu. D'éminents médecins se succèdent à leur chevet, sans résultat... Mais, quand il s'agit d'amour, rien de tel qu'un faux docteur pour guérir de fausses malades ! Deux courtes comédies dans lesquelles Molière se moque de la vanité des médecins et de la sottise des pères.
Anthologie proposée et commentée par Christine Chollet et Bruno Doucey
Avant de mourir, un meurtrier rédige sa confession, terrible récit où le destin prend la forme d'un chat borgne, marqué à la gorge d'une tache en forme de gibet; un cheval couleur de feu s'échappe d'une tapisserie pour que s'accomplisse une ancienne prophétie; une forme spectrale sème la terreur dans la salle de bal... Huit histoires pour trembler, parmi les plus noires qu'ait imaginées le grand écrivain américain Edgar Allan Poe.
La ville de Vichy est réputée pour sa tranquillité et ses bienfaits.
Mais de drôles de voleurs cherchent à détrousser les curistes et à séduire les jeunes filles de la bonne société. Une comédie gaie et pétillante, d'une fantaisie étourdissante, des personnages légers et attachants, d'autres désopilants ou caricaturaux, un art achevé du dialogue et du pastiche.
Petit carnet de mise en scène conçu par Camille Weil.
C'était au temps où la révolution industrielle était en marche, où les campagnes perdaient leurs travailleurs au profit des villes, où les métropoles grossissaient... Et dans ce temps-là, quelle est «L'Âme de la ville», se demande le poète ? Qeuls sont ses nouveaux temples : «Les Usines», «La Bourse», «Le Bazar» ? À quel rythme vit-elle : celui du «Spectacle», de «La Révolte», des «Idées» ? Les réponses sont en vers, en strophes, en poèmes : attendez-vous à être surpris. Après avoir rappelé le contexte historique et littéraire des Villes tentaculaires, l'accompagnement critique rend compte de la structure du recueil. Les échos avec Les Fleurs du Mal de Baudelaire font l'objet de lectures comparées. La réactualisation des formes poétiques par Verhaeren est mise en lumière : la fresque historique et l'allégorie, par exemple. Deux poèmes, «La Plaine» et «Les Usines», font l'objet d'une analyse précise. Recueil de poésie (XIX? siècle) recommandé pour les classes de lycée. Texte intégral.