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Levesque
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« Je suis encore petit. Lili aime se frotter contre moi l'après-midi quand on fait la sieste. Elle ôte ses culottes qui sentent fort en disant que c'est parce que le bébé a fait pipi dessus. C'est bon et irritant à la fois ; je me laisse faire sans protester. Je la trouve jolie, ma petite tante, surtout lorsqu'elle ne se fâche pas, qu'elle soupire et me serre entre ses jambes moites. La chaleur de la chambre fermée et une fatigue étrange me poussent vers le sommeil. Ça sent le bébé qui dort, la sueur et les culottes de Lili. Lorsque je me réveille, qu'elle n'est plus là, je ne me souviens de rien. Seules les odeurs persistent, mélangées à celle de la moisissure qui envahit les murs. Le soleil frappe de biais les battants fermés des jalousies et tisse des raies brillantes de poussière dans la pénombre humide. Très forte envie de pisser. »
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« Negâo se dirige de nouveau vers le haut, comme s'il participait aussi à la battue, de son pas marin, sans se cacher, en remontant les sentiers la mitraillette sous le bras. Il fait un signe de la main aux hommes armés, en leur indiquant l'impasse qu'ils croyaient vide. Ceux-ci se protègent d'un ennemi invisible, se retournent en suivant sa consigne pour cribler de balles les cabanes de ce côté. Et ils tombent un à un, non sans avoir blessé d'autres policiers qui leur faisaient face. La confusion est générale, la meute se mord elle-même au milieu des cris et des imprécations pendant que la proie s'éclipse.
Toujours en remontant, Negâo profite du brouhaha pour s'approcher d'un autre petit détachement. La lueur de leurs cigarettes est une cible parfaite. D'une rafale, il les fauche encore à la hauteur de la poitrine pour disparaître de nouveau. »
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Geneviève Gagnon, alias Lili, poursuit ses rêveries de flâneuse solitaire. La jeune universitaire se rappelle les Laurentides de ses joies estivales : le chalet, le lac, les baignades. Elle se rappelle aussi les tristes circonstances qui amenèrent sa famille à vivre un temps à Berlin, île emmurée où naquit l'amitié qui la lie encore à la pétulante Hannah Stein. Dans le Berlin de 2007, Geneviève voit son regard sur la vie transformé à la suite de deux chocs : une commotion cérébrale qui lui ouvre les yeux sur sa propre vulnérabilité, et une visite au Musée juif de Berlin où elle est confrontée à l'oeuvre picturale de Charlotte Salomon. Roman épisodique, peint par petites touches, Sillages offre une intrigue serpentine qui dévoile peu à peu les paradoxes d'une histoire - personnelle et collective - où l'on préserve les souvenirs telles des reliques, les plus traumatiques comme les plus tendres.
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Ce recueil propose une série de fabulations où le lecteur contemporain se sentira comme chez lui. Il aura même un sentiment de déjà-vu. Comme s'il entendait un air familier joué par les trompettes de l'Apocalypse, laquelle annoncerait sa propre fin depuis un ciel dépoétisé.
Les histoires imaginent le monde à rebours, elles racontent un futur d'abord lointain puis plus rapproché et, finalement, le moment présent. Cependant, ces époques se valent toutes. Le pire a toujours déjà eu lieu. La décrépitude est aujourd'hui totale. Demain n'est guère mieux. Quant aux personnages, ils ont de la difficulté à distinguer la réalité du monde virtuel. Certains vont même jusqu'à épouser de façon érotique leur téléviseur. L'image en boîte les vampirise au point qu'ils ne la perçoivent plus comme un phénomène étranger. On a enfermé leur esprit dans l'oeil de la caméra, conscience divine que l'écrivain du XXIe siècle naissant jalouse secrètement. En fait, ce livre, comme le dirait William Marx, est un adieu à la littérature.
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« Il était une fois un petit garçon appelé Conrado. Un beau jour, devant toute la confusion du monde, il cessa de parler. Au début, soulagé, il ne savait pas encore très bien ce qu'il faisait. Puis, trouvant la situation confortable, il prit la décision de ne plus rien dire, de ne plus jamais parler de sa vie. Il devenait alors, de son plein gré, ce qu'il avait toujours été, un spectateur. La vie était l'affaire des autres, entrecoupée d'images publicitaires et de changements brusques de sens. Lorsqu'elle devenait insupportable, il lui suffisait de fermer les yeux comme on ferme la télévision. »
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Aujourd'hui, c'est Valérie. Valérie Bordeleau qui lance son deuxième roman. À peine trente ans et son nom circule déjà plus souvent qu'à son tour dans la presse culturelle et la bouche des libraires. Son premier livre avait reçu une reconnaissance immédiate, il y a deux ans à peine. Dès sa parution, on avait parlé d'une voix singulière, étonnamment affirmée et d'une lucidité douce-amère qui sait ne rien vous épargner de la réalité. C'est tout ce que Mélissa peut en dire. Parce que ce livre-là, elle n'a pas pu le parcourir au delà du troisième paragraphe. Dès les premières lignes, elle a été secoué par la beauté de la langue, par la pure intensité de l'émotion. Tout lui paraissait juste. Trop juste. Et rapidement, elle s'était rendue compte qu'elle ne pourrait à la fois porter le poids des mots et celui de sa propre médiocrité.
Esther Croft nous offre des moments de lecture inoubliables dans ce recueil de dix nouvelles où elle scrute l'âme des êtres humains. L'univers que Croft partage avec ses lecteurs n'est pas gentil, douillet, confortable : c'est celui de la blessure, celle que nous avons tous quelque part en nous-mêmes.
Un regard percutant sur la réalité du monde, des relations humaines et, comme toujours, une écriture juste et épurée qui atteint toujours sa cible : le coeur.
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« Je me demande ce qu'un train comme le vôtre faisait là, et cela m'inquiète [...]. Mais avec les trains, des étrangers peuvent venir troubler notre paix à Voksal. [...] Je me suis trompé de place pour un petit moment, mais je sais que c'est passager. Une fois ressorti de ce trou, je serai toujours Adrian Traum, ingénieur dans l'usine de mon beau-père à S., et ce cauchemar aura cessé. Je ne penserai plus jamais aux pauvres culs-terreux de cette bourgade en ruine. [...] Une gare, dit le vieux, est un lieu de passage. [...] Sauf pour un cheminot comme moi, il ne viendrait à l'esprit de personne d'habiter une gare. Le cheminot lui-même y est de passage, puisque son travail est de voyager et de garder ouvertes les voies pour d'autres voyageurs. »
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« Myriam B. Gers, femme nordique et complexe, vivrait bien après le début du vingtième siècle, mais pourtant, elle s'identifiait à ce siècle et crut, comme son beau visage le laissa deviner parfois, qu'elle était née à la mauvaise époque. Elle aurait dû avoir une centaine d'années de moins, selon son calcul. Elle vivait, en réalité, en l'an 2000, mais s'éveillait en 1900 bien des matins, le temps d'un poème. Le rapport que cette femme entretiendrait avec le temps et l'espace était particulier et un peu prophétique, car on commençait tout juste à admettre que le temps n'est pas forcément linéaire, et la théorie des cordes venait d'en montrer un modèle possible. Le temps, tissu cosmique fabriqué par l'Homme, avait ses plis et ses creux, et refusait de s'allonger gentiment comme un drap. On en voulut au temps, et personne n'eut envie de vieillir, au point de nier la mort comme réalité humaine - ou de l'éloigner le plus possible des sens, et donc de la vouloir invérifiable. » Un huis clos sur le paquebot l'Athenia, de l'Orient vers l'Occident, avec des personnages fascinants qui veulent refaire le monde. : Aglaia, qui promène son ennui sur les ponts ; Ness, qui cherche l'adoption (père et mère) ; Bouvard et Pécuchet, éternels figurants spécialistes de la recherche, et plusieurs autres sans oublier la correspondance de Charles-Emmanuel Gauterier qui cherche, lui, son ancêtre.
Le tout raconté dans un style poétique propre à la romancière Andrée Laurier.
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«Curieux, mon vieux... Toute cette agitation, comme s'il s'agissait vraiment d'un voyage distinct de ceux du passé. Tu es déjà parti tant de fois, pour des mois entiers, et cela te paraissait alors bien plus simple. Qu'est-ce que ce voyage-ci a de si différent des autres pour te laisser dans cet état d'agitation ? Serait-ce que tu ne comptes pas revenir ici ? Attention, vieux, souviens-toi des paroles d'Isidore et mets un frein à tes attentes pour ne pas te casser la figure. Ce n'est qu'une visite touristique, tu y vas en étranger tout en gardant intacte ta vie d'ici. Oublie pour le moment tes fantaisies d'incendie libérateur, car tu ignores ce que tu retrouveras là-bas. Ne brûle pas tes bateaux, puisque tu auras peut-être envie de revenir plus vite que tu ne le penses. »
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En 1998, à la parution du troisième recueil de nouvelles d?Esther Croft, Tu ne mourras pas, deux critiques littéraires importants viennent confirmer le grand talent de la nouvellière :
On connaît pour avoir lu ses deux recueils précédents, La mémoire
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« Alors, ayant longuement marché afin de mieux réfléchir, car la marche, surtout en hiver par temps froid et sec, le tonifiait, fournissait comme un rythme nécessaire qui stimulait ses pensées, les ordonnait ; ayant ensuite longuement tourné en rectangle, forcément, autour de la table de ping-pong [...], il finit par aller s'asseoir à son bureau. Pour continuer à réfléchir, sans doute. Ou à tourner en rond, peut-être. Devant lui, papier, stylos et clavier qu'il regardait ou fixait, allez savoir, sans doute sans trop les voir, allez donc savoir.
Le fantasme. À vrai dire, le sujet dont il devait faire une nouvelle, un poème ou un essai - un texte, disons - le fascinait et l'embêtait tout à la fois, sans qu'il puisse bien distinguer entre fascination et embarras. Il lui semblait même, pour être parfaitement honnête, que ce dernier, l'embarras, y était pour une bonne part dans l'attraction exercée par le sujet proposé. Où, quand, comment commence le fantasme ? Quand est-ce que je (qui est un autre, ça rassure de le savoir, merci Arthur) fantasme ? »
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« Avril 1964. Le jeune lieutenant Boris Nikto, étudiant en mathématiques à l'université et militant communiste, est en fuite. Il est dans un petit autobus en compagnie de trois de ses camarades gradés et de sept soldats. Le capitaine est blessé à la jambe, mais ne saigne plus ; le pansement qu'on lui a fait il y a quelques heures a suffi. Ils se sont dépouillés de leurs uniformes depuis longtemps et portent des vêtements civils dépareillés, trouvés au hasard de la fuite. Les armes et les munitions sont cachées sous les banquettes.
Ils roulent depuis des heures, depuis le début de la soirée, et le soleil est déjà bien haut dans le ciel. La chaleur est accablante mais ils ne peuvent pas s'arrêter. [...] Si l'on se fie aux nouvelles qui filtrent par la radio entre deux marches militaires, le coup d'État est couronné de succès. »
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De vieilles dames et autres histoires poursuit l'exploration de la minifiction présente dans Autour des gares et Troublant (cent récits). Ici, soixante nouvelles pour aller à l'essentiel, trouver à dépeindre des univers aussi étranges que réalistes.
«Semaine après semaine, les insultes ne furent guère plus longues. Parfois, on le disait "gros", ou "puant", ou "sans intelligence des textes', "mauvais critique", "mauvais baiseur", mauvais ami". D'autres fois, on le disait "nuisance publique", "source de pestilences,"MUSELEUR DES GÉNIES EN DEVENIR". Bref, rien de bien original. Mais il y avait maintenant plus de quarante signatures différentes pour un même nombre de courriels par jour. Ça envahissait. Impossible pour lui de se détacher de son écran, figé par son désir, prisonnier devant l'expectative délectable du plaisir souhaité et si régulier. Hubert ne se sentait plus abandonné, enfin !Accompagné, passant ses journées à classer par sujet, genre, élégance de style, cruauté des propos, les courtes missives qu'il imprimait chaque fois avec minutie. Les menaces de mort maintenant, Hubert les recevait comme des gages de sa célébrité. »
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Rémi, militant écologiste et anti-néolibéral, n'a plus le goût de changer le monde depuis que son amour, Catherine, sa « Sauvagesse », a été assassinée de façon violente. Devenu insupportable, un danger pour lui-même et son entourage, il part panser ses blessures dans un petit campe isolé situé aux abords du parc La Vérendrye, en pays algonquin, espérant être soigné par la nature. La garde inopinée de sa petite fille et... de la sauvage Ève, fille de son amour en allé, favorisera le retour à la vie. Enfin, ce roman dénonce l'aliénation des Amérindiens et leurs difficultés à s'en sortir.
« J'ai légèrement tourné la tête, je l'ai vu dans toute sa magnifique splendeur et j'ai compris instantanément le sens du mot Majesté. Rien à voir avec la vulgarité des vieilles pourritures couronnées et entretenues comme des catins que des armées de courtisans s'évertuent, contre tout bon sens, à garder vivantes. Cette majesté-là appartient à la beauté du monde, et son immense couronne atteste de la place qu'Hercule occupe tout en haut de la hiérarchie des espèces avec lesquelles je partage mon dernier havre. Je n'en ai jamais vu de semblable : une bête lumineuse, puissante, fière. Mes yeux se sont à peine posés sur lui, j'ai su que l'orignal était le prince de cette petite république dont j'ai fait mon royaume. Pour une des rares fois dans ma vie, je me suis incliné. »
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Ici, le poète s'éclate et quitte son univers habituel pour nous proposer de courts dialogues, dont certains sont criants d'actualité. Le « bordel » auquel Soudeyns nous convie est celui du mois de septembre qui s'absente sans permission, ou celui de l'inspecteur de l'heure avancée qui se conduit comme un fonctionnaire véreux, ou celui, non moins désopilant, du portier du paradis qui négocie les sièges à la porte, ou encore, celui du taxi de la langue qui se fait pincer par un inspecteur de la langue française.
Seize textes donc, seize petites perles empreintes d'un humour fin souvent près de l'absurde. On rigole beaucoup, on réfléchit aussi. Une belle surprise !
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« Comme un bouton s'épanouissant parmi des roses qui fanent, la princesse Kim lève son mince regard vers le soleil de son amour qui cherche à lui dire des mots doux comme un bruissement d'ailes mais, ne les trouvant pas, se contente de sourire des yeux et des lèvres. Main dans la main, les nouveaux amants s'écartent des curieux et s'en vont dans le jardin, parmi les monuments de marbre plus discrets, échanger des voeux, des promesses, des serments, prenant à témoin tout ce qui, sur terre et dans les cieux, est immuable, immortel et divin.
La princesse, que tant d'émotions finissent par vaincre de fatigue, retient mal un premier bâillement qu'elle bâillonne de sa main, et penche bientôt de sommeil sa tête sur la poitrine accueillante de Victor Chan gonflée d'orgueil et de désirs. » Nuages est divisé en trois parties de neuf nouvelles : « Cirrus », « Cumulus » et « Nimbus ». Les nouvelles y sont parfois sombres, parfois humoristiques. Le style de l'auteur y est, comme toujours, subtil et tout en nuances.
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L'auteur d'une fiction est juge et partie face aux personnages qu'il a imaginés.
Que penser d'un chercheur rangé, projeté par les circonstances dans une carrière politique où l'ivresse de la popularité personnelle et les occasions d'aventures extraconjugales bouleversent la vie familiale et l'équilibre personnel ? De son épouse qui, aux prises avec de graves difficultés de santé, demeure à ses côtés malgré la perte de leur complicité amoureuse ? De leur ado de fils qui choisit ce moment pour se lancer dans des dérives idéologiques puis religieuses qui ont tout pour emmerder ses géniteurs ? Et franchement, ces gens ont-ils encore quelque chose à faire ensemble ?
Les personnages ont opté pour un procès avec jury... soit vous, public lecteur.
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Six nouvelles écrites à partir du riche thème de la « cage » : une cave sombre et humide dans laquelle sont enfermés deux enfants ; un homme pris au piège d'une grande toile d'araignée ; la vengeance d'une femme battue ; l'angoisse de devenir sourd d'un chanteur adulé par ses fans ; l'histoire étrange des habitants d'une petite ville ; une jeune religieuse en quête de Dieu.
Mais, attention, les personnages peuvent en sortir de leur cage ! Le retour de Claude-Emmanuelle Yance, lauréate du Prix Adrienne-Choquette 1987.
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Dans cette fresque épique, Sergio Kokis met en scène la troupe du Grand Circus Alberti qui quitte l'Europe au lendemain de la Seconde Guerre mondiale pour commencer une nouvelle vie, tenter sa chance en Amérique du Sud. Les saltimbanques vont du rêve au désenchantement, puis connaissent la misère et l'errance.
« Le campement des forains se réveille de très bonne heure, lorsqu'il fait encore noir. La vie des artistes ne s'arrête jamais, ils oeuvrent par peur de la mort, pour combattre le vide dans l'illusion que la vie existe vraiment et qu'elle vaut la peine d'être vécue. Le cirque est un organisme où chacun remplit des fonctions multiples, dans une sorte d'immense métabolisme grouillant qui n'a d'égal que la vanité des hommes. Certains d'entre eux sont des bêtes de la lumière, d'autres sont des oiseaux de l'ombre ; et ils sont accompagnés d'hommes et de femmes à tout faire, opiniâtres et confiants, qui travaillent pour joindre le matin et la nuit, la clarté et les ténèbres, de façon que la vie ne cesse pas de couler un seul instant vers le prochain spectacle. »